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Découverte de la danse verticale avec Amelia Rudolph, pionnière de la discipline

Nous avons rencontré Amélia Rudolph, l’une des pionnières de la danse verticale. Avec sa compagnie Bandaloop, elle propose des spectacles de danse prenant place dans d’incroyables endroits, des falaises du parc de Yosemite en Californie jusqu’aux grattes-ciel du monde entier.



Nous utilisons Bandaloop comme un mégaphone pour porter des paroles importantes. Bandaloop c’est aussi un combat de justice sociale, on utilise l’art pour soutenir le changement.



Nous avons rencontré Amelia Rudolph, fondatrice de Bandaloop, la première compagnie de danse verticale créée en 1991 à San Francisco. L’idée est simple mais brillante, monter sur les parois d’un bâtiment ou sur les plus hautes falaises pour descendre en rappel et présenter un spectacle de danse… verticale donc. Mais Bandaloop ne s’arrête pas là, bénéficiant d’une large audience mondiale, la compagnie intègre les valeurs de la nature dans ses représentations afin d’éveiller les consciences sur des sujets environnementaux ou sociétaux. Un savant mélange de grimpe, de danse et de militantisme. Une compagnie plus que jamais ancrée dans son époque, qui tente de faire rayonner le bon sens au travers du beau.

Comment est né Bandaloop ?

Je commençais l’escalade à cette époque, en 1991. J’étais en pleine escalade et je me suis demandée s’il était possible de faire un spectacle de danse dans les montagnes, en utilisant les cordes et les dégaines. C’est comme ça que tout à commencé, c’est la genèse de Bandaloop

C’est quelque chose qui se faisait de danser à la verticale accroché à une corde ?

Non pas du tout. En revanche je me suis inspirée d’autres grimpeurs. La grimpeuse américaine Lynn Hill avait donné une vidéo à un autre ami grimpeur, qui me l’a ensuite donnée. Dedans il y avait des Français comme Antoine Le Menestrel qui présentaient l’escalade sous forme de performance. Bandaloop n’est pas éloigné de ça, avec cette même idée de rassembler l’art et le sport. Antoine fait aussi fréquemment des performances sur des immeubles. J’ai été influencé par ça. Beaucoup de gens en France à cette époque transformaient l’escalade en performance. Il y avait aussi cette fameuse chorégraphe américaine, Trisha Brown. J’ai entendu qu’elle avait réalisé une pièce dans les années 70 qui s’appelait Men walking down the side of a building. Des années plus tard j’ai eu la chance de performer pour sa compagnie. C’était un honneur.

Quelles ont été vos premières représentations ?

Notre tout premier show était dans une salle d’escalade. On l’a fait deux fois, et la deuxième fois il y avait aussi une compétition nationale. Beaucoup de grimpeurs sont arrivés en ville, peut-être 150. C’était très excitant. En 96 nous avons fait notre premier show sur un immeuble, sur le Space Needle à Seattle. On a mis six mois pour avoir la permission de danser sur cette architecture incroyable. Ça a fait beaucoup parler de nous dans la presse, les gens ont commencé à nous connaître. Après ça on a pu faire un énorme show à Houston dans le cadre d’un festival en 97. C’était notre premier gratte-ciel, avec 90 mètres de rappel. Il y avait 40 000 personnes, et l’Orchestre symphonique de Houston jouait au pied du bâtiment. C’était énorme !

Aujourd’hui il y a beaucoup de gens qui pratiquent la danse verticale ?

Beaucoup plus qu’à l’époque. Il suffit d’aller sur le site Vertical Dance Network pour le voir. On y retrouve toutes les informations sur les compagnies du monde qui pratiquent la danse suspendue. Quand j’ai commencé, presque personne ne dansait accroché à une corde, vraiment peu. Aujourd’hui il y doit y avoir 25 ou 30 compagnies qui le font.

Qu’est ce qui a changé depuis que vous avez commencé ?

Ce que nous faisons depuis ces dix dernières années est devenu beaucoup plus complexe. Je travaille avec plus de gens, des compositeurs, des artistes etc. J’ai récemment monté un show qui s’appelle Public Canvas et qui est présenté dans plusieurs villes. L’idée est d’utiliser Bandaloop et nos plateformes qui drainent de grosses audiences pour attirer l’attention sur certaines voies importantes des communautés où nous allons. Par exemple à San Francisco nous avons beaucoup parlé de la gentrification, des problèmes raciaux et de l’équité. Et il y a des artistes qui viennent. On a eu récemment un artiste qui utilise le parler, j’ai travaillé avec lui pour qu’il puisse marcher en descendant un mur tout en récitant ses poèmes.

Peut-on dire que Bandaloop est un genre de hub où l’on retrouve de nombreux artistes…?

Bandaloop permet en effet de rassembler de nombreux artistes, différentes voies aussi. Nous utilisons Bandaloop comme un mégaphone pour porter des paroles importantes. Bandaloop, c’est aussi un combat de justice sociale. On utilise l’art pour supporter le changement. 

Comment vous regarde-t-on en live ? Ça doit faire mal au cou…

On encourage les gens à venir avec des matelas de plage ou quelque chose du genre, une chaise ou quelque chose pour pouvoir s’allonger au sol. Aujourd’hui tout le monde marche la tête baissée sur son téléphone, j’aime bien dire que les shows de Bandaloop sont thérapeutiques. Ils vous font lever la tête.

Quelle a été votre show le plus mémorable ?

C’était il y a peut-être 15 ans, on avait prévu un show à Johannesburg en Afrique du Sud dans le cadre d’une conférence sur le changement climatique. Parce que Bandaloop a été créé avec l’idée de célébrer le pouvoir et la vulnérabilité de la nature, et on nous avait viré de l’endroit. On avait décroché nos cordes, on s’était fait virer. Nous étions donc allés à Soweto, à 15 km de là, pour aller danser sur un château d’eau. On étaient entourés d’enfants pendant une semaine, qui étaient tous très curieux. On a fait notre show en projetant des images de chaos climatique, et du futur du climat, en montrant les possibilités de l’énergie solaire et non carbonée, c’était l’objectif du show. L’eau est un gros problème en Afrique, et le château d’eau n’en avait jamais contenu… Ce show avait tellement de sens.

Après en tant que performeur ce que je préfère c’est danser sur El Capitan, dans le parc de Yosemite. Et plus généralement dans les montagnes. Performer très haut sur des falaises est la chose que je préfère au monde. Être littéralement à plusieurs centaines de mètres, c’est un sentiment incroyable de liberté. On a l’impression d’être haut dans le ciel avec les aigles.

Prévoyez-vous de venir faire un show en France ?

On n’a jamais rien fait en France, c’est dingue. Je ne sais pas pourquoi. On a juste fait une performance en haut de la tour Eiffel… de Las Vegas (rires). J’aimerais beaucoup venir en France, il y a de très belles falaises près de Lyon, et j’espère vraiment pouvoir venir faire quelque chose à Paris. Je passe un appel ici, si quelqu’un est intéressé, nous le sommes.



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